Je viens de tomber sur une discussion qui m’a replongée dans mes pensées nocturnes favorites : l’inégalité salariale. Au cœur de ce débat, Marion Rousse, cette femme qui incarne aujourd’hui l’évolution du cyclisme féminin. Entre petit salaire et grand rôle, son parcours raconte bien plus qu’une simple success story – c’est le miroir d’un sport où les femmes doivent encore batailler pour exister financièrement. J’ai envie de vous raconter ce parcours comme on le ferait autour d’un café, sans détour, parce que ces histoires de rémunération sont aussi les nôtres.
Du SMIC à la direction : l’ascension financière de Marion Rousse
J’ai du mal à concevoir qu’on puisse être championne de France et vivre sous le seuil de pauvreté. Pourtant, c’était la réalité de Marion Rousse pendant ses années de cycliste professionnelle (2009-2015). Sans véritable salaire malgré son statut officiel, elle devait jongler entre sa carrière sportive et un emploi à mi-temps dans une mairie au sud de Paris.
« Il n’y avait pas d’argent » – cette phrase de Marion résonne comme un slogan tristement banal pour toutes les sportives de sa génération. Avec seulement un SMIC à mi-temps grâce à une convention d’insertion professionnelle, elle s’entraînait le matin et travaillait l’après-midi. Je me demande comment on peut performer dans ces conditions, sans temps de récupération correct.
Cette précarité financière a directement influencé sa décision d’arrêter sa carrière à seulement 25 ans. Le cyclisme féminin était alors décrit comme un « point mort » économique – une expression qui me fait grincer des dents tant elle illustre parfaitement le cercle vicieux dans lequel se trouvaient ces athlètes.
Aujourd’hui, sa situation a radicalement changé. Marion cumule plusieurs fonctions qui lui permettent de vivre confortablement :
- Consultante vedette pour France Télévisions
- Directrice du Tour de France Femmes depuis 2022
- Présentatrice de l’émission « La Vie à vélo » sur France 3
- Ambassadrice pour plusieurs marques d’équipements
Sa notoriété grandissante lui a ouvert les portes des contrats de sponsoring lucratifs, transformant complètement son rapport à l’argent. Je trouve particulièrement ironique qu’il ait fallu qu’elle quitte son vélo pour pouvoir enfin vivre de sa passion.
Une équité à construire dans le cyclisme professionnel
Quand on compare les chiffres, on a envie de s’arracher les cheveux. Le contraste entre le parcours financier de Marion Rousse et celui des hommes du cyclisme est saisissant. Julian Alaphilippe, son compagnon, toucherait un salaire brut annuel de 2,3 millions d’euros (chiffres de 2021). Dois-je préciser que nous parlons du même sport, du même niveau d’engagement physique et mental ?
Patrick Lefevere, manager de l’équipe d’Alaphilippe, a d’ailleurs fait une déclaration révélatrice en mentionnant la différence entre défendre « quelqu’un qui gagne 70 000 euros » et quelqu’un avec « un montant avec six zéros ». Ces propos illustrent parfaitement l’écart abyssal qui existe encore dans ce milieu.
Heureusement, les choses évoluent. Le salaire minimum dans le cyclisme féminin professionnel a connu une progression significative :
| Année | Salaire minimum annuel |
|---|---|
| 2020-2021 | 15 000 € |
| Aujourd’hui | 32 100 € |
Cette progression, bien qu’encore insuffisante, est largement attribuée à l’effet du Tour de France Femmes qui a apporté une visibilité médiatique inédite. Marion Rousse elle-même souligne que l’enjeu principal était d’obtenir cette visibilité « grâce à la course la plus connue du monde ».
Je me demande toutefois combien de temps il faudra encore pour atteindre une véritable équité. Combien de Marion Rousse devront abandonner leur carrière avant que le système change réellement ? Ces questions me hantent quand je vois encore tant de sportives contraintes au cumul d’emplois pour survivre.
Cette mise en lumière qui transforme le cyclisme féminin
Si le parcours de Marion Rousse est si enchantant, c’est qu’il incarne parfaitement la transition du cyclisme féminin. De discipline invisibilisée financièrement à sport médiatisé, cette évolution permet aujourd’hui aux coureuses de commencer à vivre de leur pratique – ce qui était tout simplement impossible à l’époque de Marion.
J’observe que son rôle à la direction du Tour de France Femmes depuis 2022 représente un tournant symbolique. Celle qui a souffert de la précarité contribue désormais à construire un avenir plus stable pour les nouvelles générations. Ce passage de témoin me semble particulièrement puissant.
Sa vie personnelle reflète également ce contraste financier si caractéristique du sport féminin. En couple avec Julian Alaphilippe depuis 2020, avec qui elle a un fils (Nino, né en 2021), elle vit désormais en Andorre – loin de ses années de galère financière. Je trouve ce parcours emblématique de tant de femmes qui doivent travailler deux fois plus pour obtenir une reconnaissance – y compris salariale.
La question qui me taraude reste celle-ci : combien de talents féminins avons-nous perdus faute de rémunération décente ? Combien de championnes potentielles ont abandonné, comme Marion a failli le faire, parce qu’elles ne pouvaient simplement pas se permettre de poursuivre leur passion ? Ces questions valent bien au-delà du cyclisme, et touchent à la valeur que nous accordons collectivement au travail des femmes.
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